Jobs étudiants : 1 lycéen sur 3 travaille en dehors de ses cours

Quelque 160 000 lycéens ont un emploi rémunéré, très souvent à temps partiel, en Ile-de-France. Par choix ou obligation. Un phénomène qui explique le décrochage scolaire selon la région.

Jobs étudiants : 1 lycéen sur 3 travaille en dehors de ses cours

    Quelque 160 000 lycéens ont un emploi rémunéré, très souvent à temps partiel, en Ile-de-France. Par choix ou obligation. Un phénomène qui explique le décrochage scolaire selon la région.

    Il y a ceux qui font des baby-sittings, le soir et le week-end. Ceux qui sont serveur dans une chaîne de fast-food, ou vendeur dans un magasin. Aujourd'hui, en Ile-de-France, un lycéen sur trois exerce un travail rémunéré en dehors des cours pendant les vacances d'été ou la période scolaire. Un sur trois, c'est environ 160 000 jeunes. Un sur dix travaille pendant ces deux périodes. C'est ce que révèle une étude, la première sur le sujet, présentée lors du forum régional consacré à la lutte contre le décrochage scolaire.

    Un impact sur les résultats scolaires

    Pour Boris Terruel, qui a mené l’étude commandée par la région, le travail n’est pas la seule cause du décrochage mais elle y participe. « Le lien entre travail, fatigue, et absentéisme est indéniable », insiste le sociologue qui a interrogé 75 jeunes en entretiens individuels, 82 en entretiens collectifs, ainsi que 28 membres des équipes pédagogiques dans onze établissements d’Ile-de-France.

    Expérience ou nécessité ?

    L'idée générale parmi les jeunes interrogés est que travailler en dehors est une bonne chose, permettant de se responsabiliser. Ce qui change c'est le curseur. « Dans les milieux plus favorisés, on peut travailler mais jusqu'à un certain point, analyse le sociologue. La réussite scolaire reste l'objectif principal. Pour d'autres, il n'y a pas le choix. Travailler est une nécessité. Et ils acceptent cette situation, estimant que la société est ce qu'elle est et qu'il faut faire sa place ».

    Ce qui ressort nettement, c'est que l'importance accordée au travail est avant tout sociale. « Plus un élève est défavorisé, plus l'intensité de travail est forte », constate Boris Terruel. Ainsi, 6,6 % des lycéens issus de milieux favorisés travaillent toute l'année, contre 12 % dans les milieux plus défavorisés. Ce taux est maximal pour ceux âgés de plus de 18 ans qui suivent une filière professionnelle : ils sont un sur quatre à avoir un emploi toute l'année.

    Des résultats surprises

    « Ces données sont une surprise, réagit Henriette Zoughebi, vice-présidente du conseil régional chargée des lycées. On ne pensait pas qu'ils étaient autant. Surtout, 10 % d'entre eux, font ce travail de manière intense et expliquent qu'ils en ont besoin pour vivre. La promesse d'égalité de la République n'est pas tenue ».

    Pour l'élue, il y a donc urgence. Les résultats de l'enquête sous le bras, elle a prévu d'aller toquer à la porte de la ministre de l'Education nationale avec des propositions. « Il faudrait rendre l'école obligatoire jusqu'à 18 ans au lieu de 16 ans aujourd'hui, ça limiterait le décrochage, assure l'élue Front de gauche. Il faut aussi augmenter le montant des bourses et créer une allocation d'autonomie pour les lycéens qui leur permettrait de suivre leurs cours sans être obligé à tout prix de travailler pour vivre. Certains proviseurs m'ont confié qu'ils étaient obligés de fermer leur établissement le samedi car les élèves travaillent. Cela contribue à renforcer les inégalités sociales ».

    Pauline CONRADSSON

    REPERES

    480 000.

    Le nombre de lycéens en Ile-de-France

    Un tiers d’entre eux disent travailler en dehors des cours

    25 000 « décrocheurs »

    qui sortent du système sans qualification en Ile-de-France en 2014.

    Les solutions ?

    « L’attention doit être portée dès la maternelle, prévient Béatrice Gille, rectrice de l’académie de Créteil (94). Il faut aussi augmenter les offres de formation pour satisfaire davantage les vœux des élèves, mettre en place des pratiques pédagogiques innovantes en s’appuyant sur le numérique ».

    Témoignage

    « Je n’ai pas eu le choix »

    Sabina, 21 ans, a finalement repris ses études

    Arrêter le lycée, Sabina n’a pas pu faire autrement. « J’aurais adoré faire des grandes études, mais à 17 ans, j’ai eu des problèmes personnels, il a fallu que je gagne de l’argent pour vivre. Je n’ai pas eu la chance d’avoir des parents derrière moi », raconte cette Parisienne de 21 ans aux longues boucles brunes. Si elle a sacrifié sa scolarité c’est aussi qu’elle ne trouvait pas vraiment sa place en cours. « En 3 e j’avais des mauvaises notes, on m’a orienté vers un lycée professionnel. Mais je n’ai même pas vu de conseillère d’orientation », regrette-t-elle aujourd’hui. En 1 re, elle décroche.

    Elle prépare un brevet pour devenir animatrice sportive

    Elle travaille dans la restauration, puis dans une boutique. Au bout de deux ans de petits boulots, elle a un déclic. « Je me suis dit que je ne pouvais pas faire ça toute ma vie, raconte-t-elle. Mais j'étais coincée, j'avais un loyer à payer ». Son père accepte finalement de l'héberger et elle reprend des études, suivie par le dispositif Action prévention sport de la région Ile-de-France. Elle prépare actuellement le concours de la gendarmerie et un brevet professionnel pour devenir animatrice sportive. Une équivalence du baccalauréat. De quoi reprendre confiance en soi. « Sans diplôme, on ne se sent pas comme les autres, alors qu'on a les mêmes capacités, regrette-t-elle. J'adore apprendre et j'aimais l'école. Au collège, j'avais eu 19 sur 20 en histoire de l'art, la meilleure note. Ce ne sont pas toujours les mauvais élèves qui décrochent ».

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